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Définition de l'insomnie Epidémiologie de l'insomnie Impacts socio-économiques Urgence de l'information

DEFINITION

L'insomnie se définit comme l'incapacité à initier ou maintenir son sommeil. Elle s'inscrit dans une grande diversité de troubles où le sommeil est ressenti comme insuffisant ou non réparateur. Du fait de la variabilité inter- et intra-individuelle du sommeil, il est difficile de définir l'insomnie suivant des critères objectifs tels que la latence ou la durée totale du sommeil. Pour cette raison, c'est la plainte d'un « mauvais » sommeil qui sert la définition de l'insomnie avec des critères subjectifs comme la difficulté d'endormissement, la durée de sommeil, sa continuité, son caractère récupérateur et l'ancienneté du trouble.

Il existe, en effet, chez tous les sujets et plus particulièrement chez les insomniaques, une très mauvaise appréciation du sommeil. La prise de conscience du sommeil est différente chez l'insomniaque et chez le bon dormeur. L'insomniaque surestime sa latence d'endormissement et sous-estime sa durée de sommeil mais aussi sa durée d'éveil. Il perçoit également mal son sommeil lent léger, qu'il prend pour de l'éveil, contrairement au sujet normal. C'est l'entrée en sommeil lent profond qui correspond pour lui à la perte de conscience et donc, à l'abandon du contrôle de l'activité mentale. Comme le sommeil lent léger représente 40 à 50% du sommeil, il existe une non reconnaissance d'une grande partie du sommeil. L'altération de la perception du sommeil est une notion majeure dans la compréhension de l'insomnie chronique.

Le retentissement diurne de l'insomnie réside dans :

  • une diminution des performances (difficulté de concentration, troubles de la mémoire),
  • des troubles de l'humeur - de l'irritabilité à un syndrome dépressif, avec une relation causale maintenant démontrée entre insomnie et dépression
  • une prévalence importante d'affections à caractère psychosomatique (allergie, asthme, mal de dos, hypertension, colite, migraine, ulcère...), le tout
  • dans un contexte d'addiction (alcool, anxiolytiques, hypnotiques)
  • sur fond de fatigue chronique (asthénie), émaillée de "coups de barre", avec le sentiment d'un état fluctuant entre l'éveil et le sommeil.

Ce retentissement diurne permet de distinguer l'insomniaque du « petit dormeur ».

L'insomnie est un symptôme qui nécessite un diagnostic différentiel précis. Ceci permettra de distinguer les différentes formes d'insomnies et d'en comprendre l'origine pour choisir le traitement approprié.

ÉPIDEMIOLOGIE

Les troubles du sommeil touchent une part toujours plus importante de la population. On évalue à au moins 40 millions le nombre d'Américains souffrant de troubles du sommeil chroniques. Des taux similaires d'environ 30% de la population souffrant de troubles du sommeil sont rapportés en Europe et en Australie. Deux études portant sur de larges échantillons de la population française trouvent un taux de prévalence de 22%. Un Français sur 6 se plaint de son sommeil (près de 9 millions). On retiendra que la prévalence de l'insomnie sévère en population générale est, selon les pays, de 10 à 20%. L'insomnie survient le plus souvent à l'âge adulte, après 40 ans, préférentiellement chez la femme. En effet :

  • On assiste, avec l'âge, à une aggravation et à une chronicité de la désorganisation du sommeil. 60 à 70% des consommateurs réguliers d'hypnotiques et d'anxiolytiques ont plus de 40 ans. Reste que la sévérité de l'insomnie chez l'enfant reste mal connue, les enquêtes reposant le plus souvent sur l'appréciation des parents, qui sous-estiment les troubles. Un questionnaire de sommeil adressé à des adolescents de 16 à 19 ans a pu montrer que 14% d'entre eux avaient des difficultés d'endormissement, 8% des éveils nocturnes fréquents et 6% des éveils trop matinaux. Il faut souligner, à ce propos, que l'insomnie est le meilleur facteur prédictif de l'échec scolaire, et ce devant le milieu socioculturel des parents.
  • La consommation des hypnotiques et des anxiolytiques est principalement féminine (14% de consommatrices régulières vs 9% chez les hommes). Les femmes ont une probabilité 1,7 fois supérieure aux hommes de se plaindre d'insomnie.
  • La consommation d'anxiolytiques et d'hypnotiques, et donc l'insomnie, est favorisée par l'isolement et les difficultés familiales (divorce, veuvage). Les ouvriers et employés, les non diplômés et les revenus modestes consomment beaucoup plus souvent ces produits que les cadres supérieurs, pourtant surconsommateurs de pharmacie, et les professions intellectuelles. La plainte d'insomnie est plus fréquente chez les sujets n'ayant pas d'occupation professionnelle (femmes à la maison, retraités). Le chômage et les difficultés d'insertion professionnelle génèrent une forte surconsommation (57% de plus que la moyenne).
  • Un mauvais état de santé accroît également cette consommation : le taux de consommateurs d'hypnotiques ou d'anxiolytiques augmente d'autant plus que le pronostic vital est péjoratif; il en va de même pour le degré d'invalidité. Le risque relatif de se plaindre d'insomnie est 3 fois plus élevé pour les personnes souffrant d'une maladie, plus spécifiquement de maladies cardio-vasculaires, rhumatismales, thyroïdiennes ou gastriques.

Des études épidémiologiques à long terme ont pu montrer que l'insomnie et des durées habituelles de sommeil de moins de 6 à 7 heures par nuit sont directement liées au développement d'une pathologie cardiaque ischémique, d'une hypertension artérielle, d'un accident vasculaire cérébral, d'un diabète, d'un cancer ou d'une dépression. Viennent ensuite des problèmes pulmonaires, des douleurs articulaires, des maux de dos, des ulcères gastriques, des céphalées La relation entre le manque de sommeil et le mauvais état de santé est loin d'être claire. En effet, il est plus que probable que l'insomnie peut être la cause comme l'effet direct d'un mauvais état de santé. Une santé défectueuse retentit sur le sommeil et la mauvaise qualité du sommeil retentit sur la maladie elle-même. En outre, le stress est cause de nombreux problèmes de santé (maladies coronariennes, cancer, dépression) comme de troubles du sommeil, eux-mêmes aggravant le stress De nombreuses études sont encore nécessaires pour définir le rôle exact de l'insomnie dans le développement d'un mauvais état de santé et donc, le rôle du sommeil comme garant d'un bon équilibre physique et mental. Il reste que le médecin doit considérer l'insomnie comme un signe d'alarme pouvant annoncer ou accompagner une affection somatique ou psychiatrique, ce qui est actuellement loin d'être le cas si l'on considère la réticence des patients à consulter pour des troubles du sommeil et la tendance du corps médical à minimiser les plaintes relatives à une mauvaise qualité du sommeil.

INSOMNIE ET DÉPRESSION

Depuis de nombreuses années, on connaît la relation étroite qui lie l'insomnie à la dépression. En effet, près de 70% des sujets dépressifs se plaignent dëinsomnie. Ce n'est que récemment que l'on a pu montrer que l'insomnie peut précéder la dépression et peut donc être plus une cause qu'une conséquence. Une étude épidémiologique portant sur 7 964 sujets adultes et considérant la survenue d'une dépression dans la population des sujets insomniaques comparativement à celle des sujets bons dormeurs indique que les sujets insomniaques ont 40 fois plus de risques de développer une dépression que les sujets bons dormeurs. En outre, le taux de suicide chez les insomniaques est 4 fois plus élevé que chez les bons dormeurs.

INSOMNIE ET ALCOOL

L'insomnie peut être la cause d'une intoxication alcoolique chronique. De fait, le taux d'alcoolisme est 2 fois plus important chez les insomniaques que chez les bons dormeurs et 28% des sujets insomniaques disent prendre de l'alcool pour faciliter leur sommeil. Ainsi, le risque de développer un alcoolisme chronique est 2,4 fois plus important chez les insomniaques que chez les bons dormeurs. De fait, la prise aiguë d'alcool facilite l'endormissement et augmente la quantité de sommeil lent profond mais retarde l'apparition du sommeil paradoxal, qui est alors très fragmenté par les éveils ou le stade 1 de sommeil lent léger, la fragmentation étant très importante en fin de nuit. Dans l'alcoolisme chronique, le sommeil est profondément désorganisé; il est fragmenté par de nombreux éveils et ne contient plus de stade 4 de sommeil lent profond; le sommeil paradoxal reste très instable.

IMPACTS SOCIAUX-ECONOMIQUES

La Commission Nationale Américaine de la Recherche sur les Troubles du Sommeil tentait d'estimer le coût social des troubles du sommeil. Elle estimait, en 1990, le coût direct à 15,9 milliards de dollars et les coûts indirects à 60 milliards de dollars. Dans une étude plus récente et très complète, on évalue, aux USA et pour une prévalence de 32%-33%, le coût annuel total de l'insomnie entre 92,5 et 107,5 milliards de dollars.

Les coûts directs de l'insomnie sont liés tant aux prescriptions de psychotropes (hypnotiques, anxiolytiques, antidépresseurs) qu'aux nombres accrus de consultations médicales et d'hospitalisations liés à l'augmentation de la morbidité en relation avec l'insomnie comme à l'augmentation du nombre d'accidents consécutifs à l'hypersomnolence diurne résultante.

  • Environ 215 millions de prescriptions pour des hypnotiques sont faites chaque année en Angleterre. En 1990, l'estimation de la dépense totale, aux Etats Unis, pour les 3 benzodiazépines les plus courantes (Triazolam, Témazépam et Flurazépam) était de 285 millions de dollars. Mais, cette dépense ne tient compte que de 62,6% des drogues employées pour trouver le sommeil. Ainsi, si on ajoute les anxiolytiques et les antidépresseurs fréquemment associés aux hypnotiques, la dépense totale est alors de 455,3 millions de dollars. De nombreuses substances ont des propriétés sédatives : les hypnotiques, les anxiolytiques, les antidépresseurs, les antihistaminiques, les analgésiques, l'alcool Ainsi, de nombreux sujets utilisent, de leur seul chef, des traitements non adaptés, vendus sans ordonnance, et ayant peu d'effets sur l'insomnie, entraînant essentiellement une hypersomnolence diurne, comme les antihistaminiques, l'aspirine ou la codéine. La consommation de produits inadaptés vendus sans ordonnance accroît encore le coût total des prescriptions de 84 millions de dollars par an.
  • Les bons dormeurs ont une moyenne de 5 consultations médicales par an; les sujets se plaignant d'insomnie ont, eux, une moyenne de 11 consultations si les troubles du sommeil sont modérés et de 13 si les troubles du sommeil sont sévères.
  • Différentes études ont pu montrer que les insomniaques chroniques ont un taux moyen d'hospitalisation 2 fois plus important que celui des bons dormeurs. Pour une hospitalisation supplémentaire moyenne de 1,3 chez les insomniaques chroniques comparativement aux sujets bons dormeurs et compte-tenu du coût moyen d'une hospitalisation, le surcoût lié aux hospitalisations rapporté aux 32 millions d'adultes américains souffrant d'insomnie chronique peut être estimé à plus de 25 milliards de dollars. Il est à noter qu'une première hospitalisation, devant l'inconfort des nuits passées à l'hôpital du tant au lieu (bruits, lumière ) qu'aux douleurs et au stress liés à la pathologie ayant nécessité l'hospitalisation, est souvent la cause de la première prise d'un hypnotique.
  • Les différentes études estiment qu'entre 30% et 57% des accidents de la route sont dus à la fatigue et à un endormissement au volant. De fait, les mauvais dormeurs ont 2 à 3 fois plus de chance de s'endormir au volant que les bons dormeurs. Ainsi, les sujets insomniaques ont 2 à 3 fois plus d'accidents de voiture que la population générale. De même, les sujets insomniaques ont 1,5 fois plus de chance d'avoir un accident du travail que la population générale. Une étude récente lilloise publiée en 1998 portant sur 5 008 travailleurs d'un âge moyen de 38 ans rapporte des troubles du sommeil chez 21% des sujets et l'utilisation d'hypnotiques par 9%; 35% de l'ensemble de la population étudiée présentent une hypersomnolence diurne; elle révèle ainsi l'importance de l'hypersomnolence diurne dans une population active. Il faut ajouter à ce coût quotidien celui, inestimable, des catastrophes, passées et à venir, aériennes et spatiales, ferroviaires, maritimes et nucléaires dont on sait qu'elles sont liées à une fatigue excessive et des troubles de la vigilance.
  • L'insomnie est une des plus puissants facteurs prédictifs de l'absentéisme. Si, en moyenne, un travailleur est absent 1 jour par mois, un sujet souffrant d'insomnie sera absent approximativement 3 jours de plus. L'insomnie entraîne, par ailleurs, une moindre efficacité au travail. Il semble que les bons dormeurs passent 2 fois plus de temps à travailler, étudier et communiquer que les insomniaques. Les sujets insomniaques ont 5 fois plus de chance que les bons dormeurs de présenter des troubles de la concentration et de la mémoire. Cette inefficacité au travail peut retentir sur la carrière des sujets.

L'URGENCE DU DEVELOPPEMENT DE L'INFORMATION

Le plus grave est que seuls 3 sur 10 des sujets se plaignant de troubles du sommeil reconnaissent avoir discuter de leurs problèmes avec un professionnel de santé. De fait, l'expérience des laboratoires de sommeil montre que la grande majorité des patients y sont envoyés alors qu'ils consultaient leur médecin pour un autre problème.

Encore faut-il que le corps médical en soit assez averti Une enquête menée auprès de 116 Facultés de Médecine américaines en 1988 révélait que 46% d'entre elles n'offraient aucun enseignement sur la physiologie du sommeil et que 38% donnaient de 1 à 4 heures de cours sur ce sujet, cours dont le contenu était le plus souvent obsolète De fait, l'attitude du corps médical change peu et l'insomnie est toujours considérée comme étant de nature essentiellement psychologique, ne requérant que peu d'efforts diagnostiques. Les conséquences des troubles du sommeil restent mal connues et peu prises au sérieux . L'ensemble des Sociétés regroupant les professionnels du sommeil soulignent l'urgence d'éduquer les médecins et les psychologues cliniciens sur les troubles du sommeil.

En outre, quasi aucune information sur une bonne hygiène du sommeil n'est apportée à l'école et les organismes de recherche nationaux offrent peu de crédit aux recherches sur les troubles du sommeil comme sur les mécanismes neurobiologiques à la base de l'homéostasie du sommeil. Bien que le nombre de Centres de Sommeil ait augmenté, les listes d'attente restent désespérément longues pour les patients se plaignant de troubles du sommeil. Peu de Centres sont à ce jour reconnus en France par la Société Française de Recherche sur le Sommeil.

VOIR - "L'INSOMNIE MALTRAITÉE" -