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SOMMAIRE

LA SENSIBILITÉ MÉCANIQUE CUTANÉE

1. SEUILS ET DISCRIMINATION SPATIALE

La peau a une innervation afférente très riche, dont la densité varie beaucoup d'un territoire à l'autre. La face et les extrémités (doigts : 2500 récepteurs/cm2) sont très richement innervées (cf. "homonculus sensitif"). Ces différences dans la densité en récepteurs en fonction des régions cutanées entraînent de grandes différences dans les différents seuils de sensibilité en fonction des territoires étudiés.

Le seuil de sensibilité à une stimulation mécanique de la peau correspond à un enfoncement de 6 µm et varie énormément en fonction de la localisation du stimulus. Les seuils les plus bas sont mesurés à l'extrémité des doigts. La différence de pression juste perceptible ou seuil différentiel varie aussi beaucoup d'une région à l'autre et la fraction différentielle de Weber la plus basse est d'environ 5% pour la sensibilité tactile à la pression. Le seuil de discrimination spatiale, mesuré à l'aide d'un compas à pointes sèches, est bien évidemment aussi très variable en fonction de la localisation du stimulus : les seuils les plus bas sont situés à l'extrémité de la langue et au bout des doigts (1-3 mm); le dos est la région où la discrimination spatiale est la plus élevée (50-100 mm).

2. LES MÉCANORÉCEPTEURS CUTANÉS ET LES TROIS QUALITÉS DE LA SENSIBILITÉ MÉCANIQUE CUTANÉE

On distingue, au sein de la sensibilité mécanique cutanée, trois qualités principales : la sensibilité à la pression, la sensibilité à la vibration et le toucher stricto sensu ou tact (sensibilité à la vitesse). La sensibilité à la pression est mise en jeu par des appuis importants sur le revêtement cutané. Le tact est au contraire un contact léger avec la peau, glabre (sans poils) ou velue. La sensibilité à la vibration répond à des variations de pression dans une gamme de fréquence de 30 à 1500 Hz. Ces qualités sont liées à la présence de récepteurs sensoriels différents dans l'épaisseur de la peau (épiderme - derme - hypoderme) glabre ou velue. On distingue au moins 5 types de récepteurs cutanés mécaniques, dont la répartition varie selon que la peau est glabre ou velue et dans l'épaisseur même de la peau (récepteurs superficiels ou profonds).

Des terminaisons libres souvent épaisses (35 - 65 m.sec-1) se développent autour des follicules pileux (peau velue). Les terminaisons se situent sous les glandes sébacées, tout autour de la racine du poil. Ces récepteurs sont sensibles aux mouvements des poils. Il existe, à la base de l'épiderme (glabre ou velue), des formations particulières composées par les ramifications d'une fibre myélinisée (50 - 70 m.sec-1) dont chaque terminaison se termine par un disque. Chaque disque entre en apposition avec une cellule particulière dite cellule de Merkel et il semble exister de vrais contacts synaptiques entre la cellule et le disque. Les zones riches en disques peuvent former des dômes tactiles. Ces récepteurs ou disques de Merkel sont des récepteurs superficiels, qui répondent à des pressions localisées (enfoncement de la peau) et dont la réponse au stimulus est phasico-tonique à adaptation lente. Ils peuvent ainsi coder la position et la vitesse du stimulus, soit l'indentation de la peau.
Dans les corpuscules de Ruffini, situés dans le derme, la terminaison axonale (50 - 70 m.sec-1), entourée d'une capsule fibroblastique, perd sa myéline et se ramifie abondamment. L'ensemble du corpuscule, d'allure fuselée, est ancré mécaniquement au derme par des fibres de collagène qui traversent la capsule. Ces récepteurs sont des récepteurs profonds sensibles à la pression, toniques et à adaptation lente. Ils sont sensibles à l'étirement de la peau. Ils sont également retrouvés dans les articulations, ancrés aux ligaments. Les corpuscules de Meissner, situés immédiatement sous l'épiderme dans les papilles dermiques, sont couplés mécaniquement au tissu environnant par de fins filaments de tissu conjonctif. La fibre axonale (54 - 60 m.sec-1) s'enroule en spirale autour des cellules de Schwann. Ces corpuscules de Meissner sont des récepteurs superficiels à adaptation rapide particulièrement sensible à la vitesse d'établissement du stimulus. Les corpuscules de Pacini sont des corpuscules complètement "clos". Mécanorécepteur présent dans le derme et les tissus conjonctifs sous-cutanés, il consiste en une terminaison nerveuse myélinisée (57 - 75 m.sec-1) , isolée, présentant des noeuds de Ranvier et enveloppée, jusqu'en un point situé entre le 1er et le 2ème noeud de Ranvier, par un grand nombre de lamelles conjonctives concentriques séparant des espaces emplis de liquide. Ces récepteurs profonds sont de type phasique et sont particulièrement sensibles aux vibrations.

LES MÉCANORÉCEPTEURS À ADAPTATION LENTE SONT DES RÉCEPTEURS DE PRESSION

Les disques de Merkel (superficiels) et les corpuscules de Ruffini (profonds) sont des récepteurs à adaptation lente, qui codent l'intensité de la stimulation (indentation cutanée) par la fréquence de leurs potentiels d'action. Ils sont actifs dès le début de la pression exercée sur le revêtement cutané et ne cessent de l'être qu'à la fin de celle-ci. Ils codent donc l'intensité et la durée de la pression. Grâce à leur structure (ancrage mécanique dans le derme), les corpuscules de Ruffini répondent également à des étirements de la peau. Cette sensibilité à l'étirement est directionnelle, ce qui permet à ces récepteurs d'informer le système nerveux central sur les forces et les directions des cisaillements cutanés accompagnant un mouvement articulaire.

LES RÉCEPTEURS DU TACT SONT DES DÉTECTEURS DE VITESSE

Si l'on incline doucement les poils du dos de la main, sans toucher à la peau elle-même, et que l'on maintient les poils dans cette nouvelle position, la sensation n'apparaît que durant le mouvement d'inclinaison des poils. Les récepteurs des follicules pileux sont donc à adaptation relativement rapide et la fréquence des potentiels d'action émis est proportionnelle à la vitesse d'inclinaison des poils. Les corpuscules de Meissner, localisés dans la peau glabre, détectent les variations de contact léger des objets avec la peau et sont sensibles aux vibrations pour des fréquences comprises entre 5 et 200 Hz. L'adaptation rapide de ces récepteurs, qui en fait des détecteurs de vitesse, explique que nous ne sentions plus nos vêtements quelques secondes après les avoir mis.

LES CORPUSCULES DE PACINI SONT SENSIBLES À LA VIBRATION

Les corpuscules de Pacini sont des récepteurs phasiques, qui ne répondent ni à la vitesse ni à la durée de la stimulation. Ils sont sensibles uniquement aux variations rapides d'intensité et donc, à l'accélération de la déformation cutanée. La sensibilité de ces récepteurs est optimale pour des fréquences de vibration cutanée de 300 Hz, mais ils répondent dans une gamme de fréquence allant de 30 à 1 500 Hz. Ils sont localisés dans le tissu adipeux sous-cutané mais aussi dans les tendons, les articulations, le périoste et les muscles de la face. Ils sont mis en jeu dans les salles de concert par les basses fréquences et donnent la sensation de "vibrer" à la musique, d'"entendre par le ventre".

Que ce soit dans la peau glabre ou dans la peau velue, il y a environ 5 fois plus de récepteurs à adaptation rapide (84% - tact) que de récepteurs à adaptation lente (16% - pression).

La densité de la peau en mécanorécepteurs est très variable. La paume de la main possède environ 17 000 fibres liées à des mécanorécepteurs. À l'extrémité des doigts, la densité (140/cm2) comme la proportion (43%) en corpuscules de Meissner, récepteurs du tact, sont particulièrement importantes.

La dimension des champs récepteurs de ces mécanorécepteurs varie également beaucoup en fonction de leur type et de leur localisation. Les champs récepteurs des récepteurs superficiels soit les disques de Merkel (pression) et les corpuscules de Meissner (tact) sont de petite dimension (2 à 4 mm2) tandis que ceux des récepteurs profonds tels que les corpuscules de Ruffini (pression - étirement de la peau) et de Pacini (vibration) sont plus étendus. Cependant, les dimensions de ces champs récepteurs indiquent qu'ils sont l'objet d'une faible convergence. Au contraire, chaque follicule pileux reçoit un grand nombre de fibres afférentes et chaque fibre afférente se ramifie sur plusieurs centaines de follicules pileux. Ainsi, les champs récepteurs des fibres innervant les follicules pileux sont beaucoup plus étendus.

[SUITE]